J’ai testé pour vous… l’athlétisme !

Suis-je en train de me transformer en pâle copie de youtuber ? Après « j’ai testé pour vous le ski », voici cette semaine « j’ai testé pour vous l’athlétisme en fauteuil » !

L’athlétisme était déjà une discipline qui m’attirait, mais que je n’avais jamais pu essayer. C’est désormais chose faite !
Qu’est ce que je retiens de cette expérience ? (Spoiler alert : ça ne va pas rester un one shot !) [Bien que la 2e session ait été reportée « jusqu’à nouvel ordre » pour cause de confinement…]

Quelques observations pratiques / concrètes

La ligue d’athlétisme d’Alsace, que j’avais contacté en 2015, m’avait dit qu’aucun club n’était équipé « mais par contre si vous voulez courir debout on peut vous accueillir, pas de souci » (!!). La section que j’ai rencontrée en 2020 n’a ouvert qu’en septembre 2016, quand j’avais quitté Strasbourg. Je suis en avance sur mon temps…

D’après la coach : Des coach handisport, il y en a de toutes façons bien peu. Elle est la seule dans le Bas Rhin… Quand aux coach qui maitrisent la course en fauteuil, il y en a encore moins. Selon elle, 5 à 10 au niveau national. Elle-même fait partie de ceux qui entraînent tout le monde : déficients visuels, debout, assis (et peut être des valides aussi, mais je ne me suis pas renseigné).
Je met ce chiffre en parallèle avec le nombre d’équipes de murderball en France, et on retrouve effectivement la thématique de l’accessibilité des opportunités handisport, dont j’ai déjà parlé.

Et mes sensations, alors ?

Premièrement, c’était le feu ! J’ai vraiment aimé ! (Je n’ai fait que rouler le long d’une ligne, oui, mais après tout, ce n’est pas plus sot que de se lancer une balle).
C’est simple, de suivre une ligne. Ça satisfait mon cerveau basique de n’avoir pas à se concentrer ni sur les adversaires, ni sur les coéquipiers, ni sur une balle, ni sur une raquette, ni sur un filet ou une ligne de but…
Et se concentrer sur la base : longer une ligne. Mais ce faisant, se concentrer sur soi-même, sur son corps. Comment je me tiens ? Comment je bouge mes membres ? Comment je respire ? Où est le poids de mon corps ? Où est mon regard ? Quels muscles je sollicite ? Comment est ce que je touche mes roues ? Quelle est ma fréquence de poussée ? Comment est ce que je dose mon effort ?
Tout cela, c’étaient des choses que l’on travaillait un peu en basket et en rugby. Mais ce n’était pas une fin en soi : on travaillait ces aspects pour être plus rapide sur le terrain, ou plus explosif, ou que sais-je.
Ici, la technique va être davantage une fin en soi. Et je crois que j’aime bien. Je ne m’y attendais pas, mais je crois que j’y retrouve pour partie la dimension technique des arts martiaux.

Deuxièmement, c’est si agréable de travailler avec une coach qui connaît le mode de fonctionnement de mon corps et des corps comme le mien, qui connait tout de suite certaines « clés » qu’elle peut me donner pour faire les exercices. En fait, je crois que c’est la première fois que je me suis entraîné avec quelqu’un qui connaît mon corps et mes mécanismes mieux que moi.
C’était incomparable avec l’expérience sportive en dissolution chez les valides, bien sûr. Fini, les moments où j’ai 12 ans, pas de connaissances en anatomie autres que l’expérience de mon propre corps, mais où je fais quand même face à un coach valide qui bégaye. Bien souvent bienveillant, y a pas de souci, mais fondamentalement ignorant.
Mais c’était incomparable aussi avec l’expérience sportive des équipes handies. Dans ces équipes-là, les joueurs et coach savent que les IMC sursautent beaucoup, et qu’on a une coordination en carton, mais ça s’arrête souvent là.
En découvrant l’athlétisme, j’ai aussi découvert une expérience nouvelle : avoir une coach à qui tu ne vas pas devoir, toi, débutant absolu dans une discipline, enseigner certaines choses. Je lâche prise, j’écoute, j’apprends, j’essaye, et je n’ai pas besoin d’anticiper 1000 trucs à l’avance.
Cette anticipation, quand tu es handi chez les valides, quand tu évolues dans des lieux, structures et institutions qui n’ont pas été pensées pour les gens comme toi ou les corps comme le tien, elle te colle à la peau. Et c’est épuisant. Je pense même que dans mon cas, c’est elle la principale source de ma « fatigabilité », qu’on attribue souvent au handicap, mais que j’attribuerai personnellement davantage au validisme.
Et quand ce n’est pas la -nécessaire- anticipation qui me colle à la peau, ce sont des -dispensables- piqûres de rappel de l’ordre social validiste, quand je baisse ma garde.
Alors quand je me retrouve face à une coach enthousiaste, et avec qui je n’aurai pas à me faire de soucis sur ces points, ces évidemment une excellente nouvelle.
Chaque occasion possible de pouvoir se réapproprier mon corps et le récit qu’on en fait, je la prends. Comme je l’avais écrit dans « Pourquoi tu aimes le sport ? »

Troisièmement, parce que l’athlé, c’est facile. Pour cette séance d’essai, j’ai utilisé mon fauteuil de ville. Finalement, vu mon gabarit, je pourrai, par la suite, utiliser un fauteuil de course, prêté par le club (ça coute 4000 balles neuf, ces petits bolides. Autant dire que si je le stockais dans ma voiture, ça en doublerait la valeur). Mais pas besoin de gymnase, pas besoin de ballon, pas besoin de coéquipier, pas besoin d’équipement particulier. Je peux aller rouler tranquille le dimanche matin sur la piste cyclable le long du canal.
[Sauf en ce moment à cause du confinement… D’autant qu’un fauteuil manuel, c’est un nid à microbes, le sol touche tes roues, que tu touches avec tes mains, avec lesquelles tu te touches le visage…]
J’avais écrit quelques fragments, il y a 4 ans, en janvier 2016, et ça tournait autour de l’idée du « fantasme du jogging (valide) ». Un coût très faible. Pas besoin de matériel. Pas d’horaires à respecter. Pas besoin de voiture. « Si je veux, quand je veux ».
Alors bien sûr, en handisport, ça demandera toujours plus de ressources, et toujours plus de chance que les étoiles soient alignées, que pour des valides. Mais néanmoins, ça reste la discipline la plus abordable. (Quand on utilise son fauteuil de tous les jours ou un fauteuil d’emprunt, bien sûr, cf ce que j’ai écrit plus haut sur le coût financier. Sinon, le seul truc pas cher, c’est la piscine).

Mais voila 3 bonnes raisons qui me laissent penser que certes, je vais continuer à parler de murderball, mais je vais aussi commencer à parler d’athlétisme !
(Teasing : ça va commencer par un article sur la classification… Pour voir mes premières pensées à ce sujet, rendez vous ici

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