Les histoires d’amour durent trois ans ?

En ce début d’année 2023, j’ai mis fin  mon engagement bénévole dans l’association du centre LGBTI de ma ville. Usager depuis de nombreuses années (notamment en tant que membre d’autres asso qui utilisaient les locaux) j’avais décidé en début d’année 2020 d’y adhérer et de m’engager comme bénévole.
J’ai rejoint le Conseil d’Administration de l’association en octobre 2020, que j’ai quitté en mai 2022. C’était une année et demie compliquée, la situation était tendue à cause du COVID mais aussi de très nombreux facteurs internes. J’ai donné beaucoup de temps et d’énergie à l’asso. J’ai aussi appris des choses, je me suis rapproché de certaines personnes (en même temps que j’ai découvert mes désaccords avec d’autres).
Ce que j’ai fait, je sais pourquoi je l’ai fait, et l’engagement que j’ai eu, je ne le regrette pas et je n’en rougis pas. Mais je suis sorti de cette période comme administrateur lessivé, essoré. J’ai continué mon engagement bénévole en tant que responsable d’un pôle, j’ai accueilli et formé des bénévoles, j’ai écrit des demandes de subventions. Quitter le Conseil d’Administration m’a fait retrouver le sommeil (car la responsabilité de l’asso et les tensions interpersonnelles m’ont tenu éveillé de longues heures). Mais j’ai continué à y consacrer beaucoup de temps et d’énergie, jusqu’en janvier 2023. Les vieux adages non-sourcés disent « les histoires d’amour durent 3 ans », ça y est, on y est.
Je me suis engagé dans le militantisme LGBTI pour lutter contre les discriminations. Et j’ai eu l’impression, au fil du temps, que d’autres tâches chronophages et moins porteuses de sens sont venues grignoter le temps bénévole (forcément limité, compté) que j’étais prêt à y consacrer. En chemin, j’ai eu l’impression de me perdre, d’être sans cesse dans le « comment » au risque d’y perdre le « pourquoi ». Je me suis perdu en chemin, et c’est dans l’espoir de me retrouver que je prends le large.
On peut ajouter à cela, comme cela arrive fréquemment dans les collectifs militants, des désaccords plus ou mons intenses ou fréquents sur la ligne politique de l’association ou sa gouvernance. Rien de grave en soi. Ce départ, c’est à la fois une grande tristesse et une joie intense. Maintenant que c’est fait, c’est la joie intense qui prime. Mais si cela a mis tant de temps à se concrétiser, c’est aussi qu’il y a eu de la tristesse. Cet engagement bénévole, avec ses hauts et ses bas, je crois que c’était un peu ma relation toxique à moi.

L’année 2022, c’est celle où le diagnostic de mon papa et sa maladie m’ont fait passer beaucoup plus de temps proche des miens, loin de chez moi et de mes engagements. Jusqu’à son départ, quelques semaines avant Noël. Forcément, perdre son père alors que j’ai à peine la moitié de son âge, ça invite à reconsidérer la façon dont on emploie son temps. Que ce soit au niveau personnel, professionnel, bénévole.

Alors je suis très content d’avoir repris ma liberté, de jouir d’un peu plus de temps pour moi (sur les heures que je peux ne pas abandonner au capitalisme). Mais aussi, mais surtout, j’ai le sentiment qu’en ce moment, certaines choses et causes ont plus besoin de moi que le militantisme LGBTI. Des projets anciens ou plus récents, en rapport avec le militantisme anti-validiste, émergent ou se concrétisent. C’est à eux que je vais me consacrer pour le moment, en plus de ce vaste chantier (qu’on appelle la vie) qui consiste à répondre à « qu’est ce qui est important pour moi dans la vie ? »

J’étais déja cette personne ouvertement et visiblement, trans et handie seulement impliquée (collectivement) dans les luttes LGBTI. J’aspire désormais à être cette personne toujours ouvertement et visiblement trans et handie, mais qui parvient à réconcilier ces deux aspects de mon identité, y compris dans mes engagements collectifs.

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